Érigée au Xe ou XIe siècle, l’église d’Amsoldingen, près de Thoune, est l’un des rares bâtiments sacrés du Premier art roman qui subsistent en Suisse. Cette basilique millénaire à triple nef fait partie du groupe des douze églises du lac de Thoune. Son décor intérieur dépouillé, rythmé par des piliers monumentaux et sa crypte, sont remarquables. Tout comme l’église du château de Spiez, qui date à peu près de la même époque, elle a un style architectural qui témoigne de liens étroits avec le nord de l’Italie.
Un ensemble unique d’objets du haut Moyen Âge
L’histoire de l’église d’Amsoldingen remonte à bien plus loin, comme le révèlent certains remplois intégrés aux maçonneries. Vingt fragments de sculptures en calcaire du Jura datant du haut Moyen Âge y sont exposés depuis leur mise au jour lors de la restauration de l’église il y a 45 ans. La nouvelle exposition les présente dans une scénographie moderne, accompagnés d’une inscription romaine retrouvée dans la crypte. C’est la première fois qu’un aperçu complet de la riche histoire de l’église d’Amsoldingen est proposé au public.
Cet ensemble de trouvailles du haut Moyen Âge est unique en Suisse. Il n’existe que de rares exemples comparables en Europe. Ils proviennent de l’abbatiale de Saint-Denis, près de Paris, ainsi que du sud-ouest de la France et sont datés du milieu du VIIIe siècle. Les éléments mis au jour dans l’église d’Amsoldingen suggèrent que l’édifice a remplacé un bâtiment richement décoré datant du haut Moyen Âge. Les fouilles ont d’ailleurs confirmé la présence de vestiges d’une chapelle antérieure sous la nef centrale de l’église actuelle.
Inscriptions romaines
L’inscription qui accompagne les fragments sculptés du haut Moyen Âge dans la nouvelle exposition est gravée sur un autel funéraire romain. Ce bloc de calcaire pesant à peu près 600 kg provient d’Avenches, d’où il a été rapporté au Moyen Âge, environ 1000 ans après sa fabrication. Il a été utilisé avec d’autres autels funéraires et des colonnes d’origine romaine pour ériger une colonnade dans la crypte. Les inscriptions lapidaires romaines ont été sorties de la crypte en 1876 pour être installées d’abord à la mairie de Thoune puis au musée. Dans la crypte, elles ont été remplacées par des colonnes en grès. Lors de la restauration de 1980, des copies des inscriptions lapidaires ont été placées dans la crypte. L’une de ces intéressantes pierres est à présent de retour à Amsoldingen tandis qu’un bloc original est présenté au château de Thoune.
Le remploi d’anciens éléments de construction est attesté également dans les églises clunisiennes de Villars-les-Moines (Münchenwiler) et de l’île Saint-Pierre. Cette pratique s’explique par la valeur matérielle des pierres, mais pas seulement : c’est aussi un choix esthétique et symbolique. Dans l’église d’Amsoldingen, par exemple, les inscriptions lapidaires romaines conféraient un âge vénérable au chapitre de chanoines, qui représentait le cœur d’une communauté de prêtres. Les efforts faits pour transporter les blocs sur une distance considérable pour l’époque sont remarquables.
Parcours de visite extérieur
L’église du Premier art roman d’Amsoldingen est près de quatre fois plus grande que l’édifice antérieur datant du haut Moyen Âge. On pense qu’elle servit dès l’origine au chapitre de chanoines. Contrairement aux moines dans un cloître, qui vivaient en communauté dans une enceinte fermée, les chanoines avaient chacun leur propre maison. Ces maisons étaient construites autour de l’église. Au départ, Amsoldingen comptait dix chanoines, mais il n’en est resté que cinq à partir du XIVe siècle.
Lors de la rénovation du château d’Amsoldingen, un bâtiment en mains privées proche de l’église, le Service archéologique du canton de Berne a découvert en 2007 et 2008 les vestiges d’une ancienne bâtisse en pierres dans les murs du château. Il s’agit vraisemblablement d’une maison de chanoine datant des alentours de 1220. Il y a tout lieu de penser que d’autres maisons de chanoine se cachent dans des bâtiments historiques proches l’église d’Amsoldingen. Un parcours de visite jalonné de panneaux d’information et une brochure d’accompagnement invitent à découvrir ces vestiges importants à l’extérieur de l’église.
Inauguration du nouvel espace d’exposition et du sentier d’interprétation
L’inauguration du nouvel espace d’exposition et du sentier d’interprétation aura lieu le vendredi 25 avril 2025, à 17 heures, à l’église d’Amsoldingen, en présence de Stefan Gyger, maire d’Amsoldingen, de Monika Eicher, présidente de la paroisse, et d’Adriano Boschetti, chef suppléant de l’Office de la culture du canton de Berne et archéologue cantonal. Les exposés de Katrin Roth-Rubi, archéologue, et d’Armand Baeriswyl, responsable de la section Archéologie médiévale et du bâti du Service archéologique du canton de Berne, seront le point d’orgue de la rencontre. La manifestation est ouverte au public.
- Vue sur l’église d’Amsoldingen. © Service archéologique du canton de Berne, Roger Grisiger
- Vitrine présentant des fragments de sculptures du haut Moyen Âge et autel funéraire romain dans le nouvel espace d’exposition de l’église d’Amsoldingen. © Service archéologique du canton de Berne, Roger Grisiger
- Le nouvel espace d’exposition retrace la riche histoire plus que millénaire de l’église d’Amsoldingen. © Service archéologique du canton de Berne, Roger Grisiger
- Panneaux d’information dans l’ancienne cour de l’église d’Amsoldingen. © Service archéologique du canton de Berne, Roger Grisiger